La clause bénéficiaire d’une assurance vie peut-elle être remise en cause ?

Le choix des bénéficiaires désignés dans une assurance vie par son souscripteur peut permettre à ce dernier  d’avantager le bénéficiaire de son choix : ami, association etc. Des litiges peuvent toutefois survenir au décès de l’assuré en présence  d’héritiers réservataires qui s’estimeraient lésés . Alors, dans quelles situations la clause bénéficiaire d’un contrat pourrait-elle être contestée ? Et quelles seraient les conséquences de son éventuelle invalidité ? Sicavonline vous explique tous les tenants et aboutissants de la remise en cause de la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie.

À quoi sert la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie ?

L’assurance vie peut servir de nombreux objectifs, que nous avons développés plus longuement dans cet article.

L’un des atouts essentiels de l’assurance vie est bien sûr, son régime spécifique en cas de décès de l’assuré. Ce régime place en effet le capital  décès en dehors des règles successorales, dans les limites de la réglementation . L’application de ce principe impose néanmoins obligatoirement la désignation d’un bénéficiaire. Le contenu de la clause destinée à l’identifier s’avère dès lors un élément primordial dans un contrat d’assurance vie.

Bon à savoir : les contrats d’assurance vie en ligne comme pour ceux souscrits hors ligne sont régis par le Code des assurances. Ainsi, pour tout contrat d’assurance vie multisupport, n’hésitez pas à vous y reporter.

Un moyen d’organiser sa succession en dehors des règles d’héritage

Selon le Code des assurances, le capital d’une assurance vie payable à un bénéficiaire déterminé ne fait pas partie de la succession de l’assuré défunt (article L132-12).

Les conséquences liées à cette règle d’exception sont de plusieurs ordres :

  • La règle de rapport ne s’applique pas aux capitaux versés. Ces sommes ne sont pas comptabilisées dans les biens du défunt pour calculer la part revenant à chacun de ses héritiers réservataires (conjoint et descendants).
  • L’action en réduction n’est pas ouverte à ces mêmes héritiers. Si le montant du capital versé aux bénéficiaires excède la quotité disponible, les héritiers lésés ne peuvent pas demander la restitution de leur part réservataire.

Attention ces éléments pourraient être remis en cause, en cas de primes manifestement exagérés. Ce point vous est détaillé plus bas.

 

  • La fiscalité des capitaux décès répond à un régime spécifique favorable dans les limites de la réglementation applicable., .

Consultez notre article dédié à la préparation de sa succession grâce à l’assurance vie.

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La possibilité d’une modification à tout moment

La désignation du bénéficiaire en assurance vie est une prérogative réservée au souscripteur du contrat.  Vous avez,  à ce titre,  la liberté de désigner la personne physique ou morale de votre choix. Vous pouvez aussi prévoir la transmission de votre assurance vie au profit de plusieurs bénéficiaires, dans les proportions qu’il vous plaira d’indiquer.

La clause bénéficiaire rédigée au moment de la souscription d’une assurance vie n’est pas figée. Un souscripteur  peut en modifier le libellé. Ainsi, en fonction de l’évolution de votre situation familiale ou de vos objectifs successoraux, vous êtes en droit de changer la désignation des bénéficiaires à plusieurs reprises, jusqu’à votre décès et sans formalisme particulier. Seul exception à cette règle : , en cas d’acceptation du bénéfice du contrat par le bénéficiaire désigné. Dans ce cas, toute modification de la clause devra être soumise à l’accord du bénéficiaire acceptant.  

Quel recours en cas de primes manifestement exagérées versées sur une assurance vie ?

En assurance vie, la clause bénéficiaire permet d'éviter les règles habituelles sur la façon dont l’argent d’une personne est distribué après son décès. Cela signifie que en assurance vie, le souscripteur d peut choisir qui percevra le capital décès  et ce indépendamment des règles successorales.

La clause bénéficiaire n’autorise cependant pas le souscripteur d’une assurance vie à avantager hors succession une personne de son choix. Elle ne peut en effet être utilisée pour porter atteinte à la part d’héritage réservée aux héritiers protégés que sont les enfants ou le conjoint. La désignation d’un bénéficiaire peut donc être remise en cause lorsque les primes versées par le souscripteur du contrat sont manifestement exagérées au regard de sa situation.

De nombreux litiges sont soulevés par les héritiers qui s’estiment injustement lésés. Une prime qui contourne par son niveau les règles de la réserve héréditaire peut être jugée excessive par les tribunaux. Elle risque alors de perdre l’avantage réservé à l’assurance vie pour réintégrer l’actif successoral du défunt.

Les critères d’appréciation par les tribunaux

La loi prévoit une exception au régime spécifique  de l’assurance vie lorsque les primes versées par l’assuré apparaissent manifestement exagérées eu égard à ses facultés (article L132-13 alinéa 2 du Code des assurances). Les textes ne définissant pas de critères pour déterminer ce caractère excessif des primes, la preuve de l’abus est complexe à apporter en pratique. Les juges disposent par conséquent d’un pouvoir d’appréciation souverain pour statuer au cas par cas.

L’analyse de la jurisprudence permet cependant de dégager les critères exigés par la Cour de cassation :

  • l’âge du souscripteur ;
  • sa situation patrimoniale au jour du versement des primes ;
  • l’utilité de la souscription du contrat pour lui-même.

Exemple de caractère potentiellement exagéré des primes, au jour du versement :

  • le souscripteur est âgé de 96 ans ;
  • la prime unique qu’il verse représente la quasi-totalité des fonds retirés de la vente de sa maison, conclue quelques jours plus tôt et constituant son seul actif successoral significatif ;
  • il mentionne dans le formulaire de souscription, comme seule attente vis-à-vis du contrat, la préparation de sa succession ;
  • il désigne un bénéficiaire unique au détriment de ses trois petits-enfants, héritiers légaux.

Le cas particulier de l’absence d’aléa

Pour bénéficier  du régime fiscal   de l’assurance vie, le contrat doit présenter un caractère aléatoire., c’est-à-dire que ni l’assureur, ni le souscripteur assuré ne savent quelle garantie sera mise en jeu : la garantie en cas de vie ( rachat total) ou la garantie en cas de décès

Ainsi, le caractère aléatoire repose sur une double incertitude :

    • l’identité du futur récipiendaire du capital constitué, entre le souscripteur (qui est libre à tout moment d’exercer sa faculté de rachat du contrat) ou le bénéficiaire désigné (en cas de décès de l’assuré) ;
    • la date de versement du capital, en cas de vie ou en cas de décès.

Lorsqu’un contrat est souscrit ou modifié par une personne dont le pronostic vital est engagé à très court terme, il n’est pas nécessaire de prouver une exagération des primes versées pour remettre en cause l’aléa attaché au contrat . Dans ce cas de figure, l’absence totale d’aléa est constituée par la nature illusoire de la possibilité d’un rachat du contrat par le souscripteur. Cette situation révèle au contraire la volonté réelle et irrévocable du souscripteur de se dépouiller en faveur du bénéficiaire désigné, en contournant les règles fiscales.

Exemple de potentiel défaut d’aléa :

  • le souscripteur est atteint d’une maladie incurable ;
  • il souscrit un contrat d’assurance vie postérieurement à ce diagnostic pour y verser plus de 80 % de son patrimoine ;
  • il désigne trois jours avant son décès sa concubine comme unique bénéficiaire.

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Quels sont les motifs de remise en cause pour nullité de la clause bénéficiaire ?

Pour être valable, la clause bénéficiaire doit être rédigée au profit d’un bénéficiaire légalement capable de recevoir, par un souscripteur en capacité de contracter. Si l’une de ces conditions n’est pas respectée, à la date de souscription du contrat ou au moment d’un changement de bénéficiaire, la clause peut être frappée de nullité.

Clauses bénéficiaires illicites

La loi encadre strictement les personnes autorisées à recevoir par donation entre vifs ou par testament. Pour éviter les abus de confiance, tout individu susceptible d’exercer une influence auprès d’une personne vulnérable, par sa profession ou son statut, ne peut être inscrit comme bénéficiaire de son assurance vie. 

En conformité avec l’article 909 du Code civil et l’article L116-4 du Code de l’action sociale et des familles, une clause bénéficiaire peut donc être annulée dans le cas où elle désigne :

  • un membre d’une profession médicale, un pharmacien ou un auxiliaire médical, dès lors qu’ils ont prodigué des soins à l’assuré au cours de la maladie dont il est décédé ;
  • un dirigeant ou employé d’un Ehpad ou d’un établissement hébergeant l’assuré en raison de son âge avancé ou de son handicap ;
  • un mandataire judiciaire à la protection de majeurs (tuteur, curateur) ;
  • un ministre du culte (prêtre, pasteur, rabbin, imam, aumônier).

Pour des raisons déontologiques liées à leur profession, un notaire, un avocat, un intermédiaire d’assurance, un conseiller en banque ou en gestion de patrimoine ne peuvent non plus valablement être désignés dans la clause bénéficiaire du contrat de leur client.

Défaut de consentement lors d’un changement de bénéficiaire

Les changements de bénéficiaires opérés peu de temps avant le décès doivent faire l’objet de toutes les précautions. Les héritiers désignés préalablement et écartés à cette occasion peuvent invoquer l’insanité d’esprit de l’assuré au moment de la rédaction de la nouvelle clause. Il leur appartient dans ce cas d’apporter la preuve que le souscripteur/assuré ne disposait pas de toutes ses facultés intellectuelles pour donner un consentement lucide et non équivoque à cet acte.

Une modification de la clause bénéficiaire effectuée sous contrainte ou emprise psychologique permet également de mettre en cause sa validité, sous réserve de pouvoir apporter des éléments probants confirmant une entorse à la volonté sincère du souscripteur.

Comment peut-on contester une clause bénéficiaire après le décès de l’assuré ?

En cas d’atteinte flagrante à leurs droits du fait de la clause bénéficiaire de l’assurance vie souscrite par le défunt, les héritiers peuvent saisir le tribunal judiciaire en défense de leurs intérêts.

Une procédure à l’initiative des héritiers lésés

Les héritiers qui s’estiment lésés par le montant du capital décès versé au bénéficiaire désigné peuvent intenter une procédure en justice. Il leur reviendra d’apporter la preuve du caractère exagéré des primes versées par le souscripteur sur son assurance vie ou de la nullité de la clause bénéficiaire pour un motif juridiquement recevable.

Les conséquences sur le sort du capital décès

Lorsque la décision du tribunal donne satisfaction à la contestation des héritiers lésés, les sommes concernées sont réintégrées dans la succession de l’assuré. Elles sont soumises aux règles successorales ordinaires et imposées selon le barème des droits de succession.

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Sources

Légifrance : Article L116-4 du Code de l'action sociale et des familles
Légifrance : Article 909 du Code civil
Légifrance : Article L132-13 du Code des assurances
Légifrance : Article L1323-12 du Code des assurances

Le contrat d’assurance vie est un placement à long terme. La durée d’un contrat d’assurance vie, le montant des primes versées et les caractéristiques du contrat choisi dépendent notamment de la situation patrimoniale du souscripteur, de ses besoins et objectifs, de son attitude vis-à-vis du risque et du régime fiscal en vigueur. Le régime fiscal lequel est susceptible d’évoluer ne doit pas constituer une condition essentielle et déterminante sans laquelle le contrat ne serait pas souscrit.

Informations non contractuelles à caractère publicitaire novembre 2023.

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